Tout ce qui est excessif est insignifiant selon Talleyrand.
Je dirais même plus, à l’instar des Dupont – Dupond, que c’est carrément contreproductif !
Une réédition de la platine B&O Beogram 4000c à 30.000€ ?
J’avais déjà épinglé ce type de délire à propos d’un vinyle (pressage japonais en série limitée de DICOVERY des Daft Punk) dans le no 96 de DANDY Magazine (décembre 2024).
Vendu 10.000€ au show room Yves Saint Laurent rive gauche et simultannément à 42,99€ à la FNAC où je me suis précipité, bien sûr pour ne pas attaquer mon PEL.
Cette expérience m’a valu un courrier des lecteurs abondant, fasciné par le miroir aux alouettes de cette anecdote.
Puis, la semaine dernière, me rendant à l’invitation presse de la boutique YSL rive droite je découvre une édition limitée de la réédition de la platine Beogram 4000 C au tarif exorbitant de 30 000 € (sans l’unité de contrôle, vendue séparément).
Qu’a-t-elle de plus que la réédition identique disponible chez les revendeurs de la marque au tarif de 10 000 € ?
Voir en détails sur le site Toys4vip : ici
Ou sur le site du fabricant ici
Réponse : Un habillage YSL (pour le coup, habiller, c’est leur métier) du socle en bois exotique et un coffret de transport dans le même bois !
Personnellement, bien que fréquentant un nombre conséquent d’amateurs de vinyle, je n’ai pas encore trouvé celui qui voyage avec sa platine, comme le commun des mortels avec son enceinte connectée pour le week-end.
Essayant de rentrer dans les conversations sur les réseaux sociaux, comme par magie mes commentaires disparaissent. Quand ça pique, courage, fuyons !
Autre surprise, le vinyle des DAFT PUNK a migré de Babylone à Saint Honoré, tout comme le VELVET UNDERGROUND !
On en revient a ma théorie sur les flux des HPA : Saint Honoré est un cran au dessus …
Bon sang, qui va l’acheter ce vinyle à 10.000 ?
Tout cela a une conséquence sur la confiance du consommateur, en réflexion légitime sur la vraie valeur des choses.
Aussi de savoir décoder quand le produit est conçu, non pas en fonction de sa valeur intrinsèque, mais en fonction des capacités financières de ses clients.
Sont en jeu la crédibilité des marques, des produits et de ceux qui en font la promotion.
Ça pique ….
Entrons dans le vif du sujet :
Un de mes combats au quotidien est de faire la promotion de la haute-fidélité de haut-de-gamme, du « High End ».
Lui donner de la visibilité du grand public et de signaler les pièges, nombreux quand on monte dans les tours…
J’ai parfois du mal à trouver des justifications sur les prix qu’atteignent certains systèmes, tenant compte des budgets R&D des marques, des matériaux employés et finalement des résultats d’écoute.
Si Bugatti, met sur le marché une automobile à 4 millions d’euros pour concurrencer la Ferrari FXXK, la Lamborghini Essenza SCV12, c’est bien entendu un exercice de style pour démontrer les capacités du constructeur, comme l’avait fait Jacques MAHUL à l’époque en créant la « Grande Utopia » FOCAL, mais aussi parce qu’il existe une clientèle fortunée pour l’acquérir.
C’est néanmoins avec des modèles UTOPIA déclinés avec des version plus abordables que FOCAL se recentre sur son marché et aussi, je l’avais signalé, en se positionnant sur des flux plus importants avec par exemple le très chic corner à la FNAC Ternes
Revenons sur terre …
Aujourd’hui, le « High end audio » en termes d’enceintes acoustiques, c’est notamment WILSON AUDIO, MAGICO, MBL, FOCAL ou ma préférée, MARTIN LOGAN.
Donc si les prix s’envolent de 50 000 à 200 000 € ou plus, cela ne me choque pas plus que ça, si le prix est justifié et surtout si le consommateur va percevoir à l’écoute, justification de sa dépense.
Je ne suis donc pas choqué non plus si B&O, met sur le marché une enceinte à 80 000 €, comme je l’ai décrit dans le numéro 96 de Dandy Magazine international. C’est le même tarif que des enceintes high end mais pour une autre clientèle. Il n’y a pas de débat.
Ce n’est certes pas un produit réellement « audiophile » dans sa conception, mais qui justifie sa mise sur le marché par un design et des matériaux remarquables et une clientèle qui le réclame.
Ne soyons pas ni manichéens ni les ayatollahs de l’audiopathie.
C’est le libre choix du consommateur, encore heureux.
Cependant, la où cela commence à me chatouiller, c’est quand assurément, il n’y a rien dans le produit pour justifier une dérive excessive du prix juste, parce qu’il y a un consommateur en face capable de mettre 3, 10 ou 100 fois le prix réel.
Lors d’un dernier post doublé d’une table ronde organisée lors du dernier salon PAVS à Paris, nous avons tâché de démêler le bon grain de l’ivraie avec pour sujet, à revoir ici : « Le High End pour le meilleur et pour le pire »
L’idée était de donner à la fois des pistes du bien maîtriser l’accès au high-end et d’évoquer les pièges permettant aux consommateurs de ne pas être dupés.
Outre les caractéristiques et des performances du produit lui-même, s’assurer que le constructeur, voire l’importateur, voire encore le revendeur, disposent des compétences idoines et seront encore là le lendemain ou un an après l’achat.
Le rôle des médias n’est pas anodin non plus.
Si les médailles que distribuent certains médias sont limités aux produits de leurs annonceurs, le doute est permis, car ils ont troqué leur indépendance éditoriale sous la pression de leurs annonceurs et/ou de leur direction financière.
La totale indépendance donc je jouis auprès de mes éditeurs me permet de dire ce que je pense sans aucun filtre et je les en remercie.
On perd parfois un annonceur, mais on sert le lecteur.
Et compte tenu de l’audience nombreuse et hyper ciblée et des résultats enregistrés, il reviennent presque toujours.
Pour exemple, ma contribution au Magazine DANDY international depuis 15 ans en est le reflet.
Avec un tirage dépassant les 40 000 exemplaires et surtout une cible, HPA et CSP++, l’impact est indiscutable.
C’est finalement le lecteur qui a le pouvoir.
Mais attention de ne pas mal interpréter mes propos, même si cette clientèle n’achète pas les revues spécialisées et ne va pas dans les salons, j’ai pour ma part un grand respect et une oreille très attentive pour la presse spécialisée qui fait un travail remarquable, et indispensable, notamment sur le plan de l’analyse technique.
Elle permet aussi de créer parmi les lecteurs, des communautés d’amateurs éclairés qui eux mêmes deviennent des prescripteurs de bonne pratiques.
Bravo donc à VU METRE, à VINYLE & AUDIO, WHAT HIFI, à ON MAG et au magazine HAUTE FIDELITE, repris récemment avec brio par Hugo LAHUTTE et les autres que j’aurais oublié !
Tous ensemble, nous guidons le futur consommateur par des chemins distincts.
Mon choix est de rester de l’autre côté, de celui du consommateur, que la technique rebute, donc d’aller au bout de l’expérientiel, du sensoriel.
Si j’évoque un poil trop de technique, je perds mon lecteur à la 2e ligne.
En revanche si j’écarte toute référence technique en expliquant quel résultat, quel bénéfice il trouve, il est ravi, car notre ligne le définit : La technologie doit servir, non asservir et surtout ne pas être le sujet.
C’est la ligne éditoriale dans mes rubriques associées » high-tech & lifestyle » pour un standard « high life ».
Cela implique qu’il faut éduquer par l’incitation à l’écoute et expliquer les choses ainsi.
Leonard Bernstein et Debussy avant lui, disaient que le plus important c’est ce qui se passe entre les notes, cet ensemble porteur d’émotion, qui peut vous tirer des larmes et qui ne sera jamais réduit à une suite binaire de 0 et de 1.
La chair de poule, les larmes, quelle fréquence, quel niveau, quelle tonalité, quelle bande passante ?
Les harmoniques supérieures des instruments sont bien au-delà des fréquences audibles elles déterminent notamment le timbre des instruments et la cohérence du message musical.
Comparez ce que vous percevez (son et émotion) au concert, et ce que vous procure votre écoute à domicile
En conclusion de ce libre propos, asseyez vous, détendez vous et écoutez.
Si à un moment donné vous ne percevez plus la différence, ne mettez pas un euro de plus !
Prologue :
Les concepts stores sont-ils dans le courant ou à contre courant ?
Si aujourd’hui la curiosité me mêne dans les concepts stores d’Yves Saint Laurent, c’est parce que ma curiosité a été piquée à la découverte de bacs avec des vinyles rares dans la boutique de Babylone à Saint Germain des Prés, il y a un peu plus d’un an.
Je les ai contactés pour leur proposer d’exposer une super platine (à l’époque la somptueuse FORTISSIMO d’EAT). Mais une autre idée germait : Co produire des éditions limitées avec des constructeurs connus.
Je n’y ai pas été pour rien car en effet, j’ai pu acheter quelques vinyles rares dont un disque légendaire du Festival du Son 1984, qui fut l’objet d’un tiers de ma carrière ! (30 €, une affaire digne des Puces de Saint Ouen)
Et pour les plus argentés, il reste néanmoins un VELVET UNDERGROUND dédicacé par Nico au prix de 10.000 €
Intéressant aussi, cette idée de graver sur vinyle en édition limitée les musiques des célèbres défilés de Yves Saint Laurent.
A 90 €, il n’y a pas d’exagération, ce sont de vrais collectors et ils sont luxueusement proposés dans un cadre rigide et transparent (Attention, dans certains cas les pigments utilisés pour colorer les vinyles peuvent comporter des « grumeaux » qui vont causer des bruits parasites à la lecture)
Enfin, nostalgie quand on retrouve le Walkman SPORT SONY de notre passé (Chez YSL) ou les nouvelles machines pour lire les mini cassettes (Au Bon Marché).
C’est oublier le contre sens : En mode mini cassette on régresse drastiquement en qualité alors que le vinyle nous apporte une écoute plus naturelle que le numérique.
Découverte intéressante aussi, cette enceinte nomade TEENAGE ENGENEERING d’un design très réussi, avec une autonomie de 8 h, déjà dans ma future sélection de « shopping high tech & outdoor » pour DANDY de Juin
Tout aussi étonnant, mais un peu hors de prix (6500€) , cette platine vinyle murale
Un peu d’histoire de « Concepts store » avant l’heure
Il faut remonter dans le passé, celui que les moins de 50 ans ne peuvent pas connaître :
Le magasin faiseur de tendance de l’époque : INNOVATION au 104 Chams Elysées !
Cela n’avait pas échappé à Armand ZAGURY (CINECO) qui s’était empressé d’y placer quelques pépites de l’audio Américaine.
On ne peut pas non plus passer à côté de COLETTE rue Saint Honoré qui avait négocié avec des marques tendance une exclusivité sur les nouveautés pour en faire des objets de désir.
Etre choisi par COLETTE que tous les média mainstream suivait, c’était mettre la marque en avant.
Elle réussit même à obtenir des exclu avec APPLE !
Puis ce fut CONRAN SHOP qui reprit le flambeau de découvreurs de talents et en suivant le BON MARCHÉ.
Mais cette fois avec moins d’esprit d’innovation, ne choisissant que les produits qui tiennent déjà le top des ventes.
En revanche, tout cet historique doit nous rappeler que la fonction essentielle et indispensable de ces initiatives, c’est de faire connaitre les produits au plus grand nombre, ce dont souffre l’audio de qualité !
Ce n’est pas dans les magasins de hi-fi que l’on retrouve le flux maximum.
Donner de la visibilité au plus grand nombre, c’est le principal atout de ces points de vente à grand flux et des marques comme La Boite Concept, B&O, CABASSE, SONOS ou PRO-JECT l’on bien compris.
C’est grâce à eux que bientôt la clientèle va revenir dans les auditoriums et réclamer plus d’offres.
Donc ces Concept Stores sont clairement dans le courant positif.
Pas sûr que ceux qui déstabilisent par des prix incohérents ne soient pas à contre courant….
Anecdote personnelle pour finir :
En 1974 j’avais ouvert un des premiers auditorium 100% dédié au high end à Paris : AUDIOSYSTEMS, juste avant de créer les salons de la hi-fi, puis de reprendre le Festival Son & Image
Pendant ces 10 années magiques, mes clients découvraient leș pépites que j’avais importées du Japon (dont la légendaire KOETSU), des US (SPECTRAL, SYMMETRY, KRELL, MONSTER CABLE, etc) ou du Canada (ORACLE) ou de celles déjà importées dont McINTOSH, AUDIO RESEARCH, MAGNEPAN etc …
A l’arrivée des grandes enseignes, FNAC la première, il fallut suivre la démocratisation pour offrir de l’écoute de qualité à des prix plus abordables. Mon ami Patrick de ROLLAND m’a fait découvrir une projet portant le nom de « New Acoustic Dimension » qui devint NAD. NAD, 60, NAD 90 et NAD 120 désignant respectivement leur puissance en watts.
Dès la première écoute, ce fut le choc. Un tel son à ce prix là !
Le deal fut conclu : Une totale exclusivité sur la marque pendant un an pour une première commande de 300 pièces en septembre. Le 1er novembre tout était vendu entre mon frère Jacques à Strasbourg et moi à Paris.
Et de repasser la même commande pour les fêtes !
Une première chaine pour audiophiles en herbe et pour contrer les grandes enseignes, avec une platine Thorens TD 150 et une paire d’AR (Acoustic Research).
Ce qui est symptomatique, c’est que vous ne pouvez pas trouver ces premiers NAD sur aucun site d’occasion : Car les heureux propriétaires les gardent !
Nonobstant les grandes enseignes qui s’installaient, le travail « d’évangélisation » sur la hi-fi de qualité continuait de se faire dans les auditoriums et c’est ce qui m’a incité mon premier salon en 1978 (qui perdure avec le PAVS, 47 ans après, merci à Philippe Carré !)
Après moi en 1974, les CTA, Présence Audio Conseil et autres magasins de haut de gamme ont continué ce travail indispensable au fil des ans.
Trouver les pépites qui hors de toute influence marketing seront les références, c’est le rôle des auditoriums indépendants.
Anecdote dans l’anecdote, quand le WALKMAN est sorti, je fus le premier livré et j’ai rendu 100 pièces en un week-end (Merci à mon ami Eric Surdej, alors directeur commercial chez SONY), le nomadisme était né grâce à Akio MORITA, golfeur mélomane et fondateur de SONY.
SONY FRANCE avait choisi de se servir des auditoriums de référence pour lancer le produit …
Concept Store avant l’heure…
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